… Il lui demandait : « Aperçois-tu quelque chose ? » Levant les yeux, l’homme disait : « J’aperçois les gens : ils ressemblent à des arbres que je vois marcher. » Marc 8, 22-26
C’est une des phrases les plus bizarres de l’Évangile. Qui sont ces hommes qui ressemblent à des arbres qui marchent ? Si c’est hallucination de l’aveugle, trouble ou accommodement de la vue après ces années d’obscurité, pourquoi l’évangéliste a-t-il jugé bon de rapporter ces paroles énigmatiques ? Quel sens ont-elles pour nous ? Que nous enseignent-elles ?
Peut-être faut-il voir Jésus pour voir le monde comme il est. Les arbres ne marchent pas, sauf dans le roman le Seigneur des anneaux. C’est la clairvoyance divine, reçue par ceux qui suivent le Seigneur, qui permet de voir le monde comme il est, voir le monde en vrai. Il nous faut voir le monde avec les yeux de Jésus. Il nous faut reconnaitre Jésus car qui voit Jésus voit le Père, mais voit aussi son prochain dans sa noblesse, le trésor derrière l’écorce de l’apparence.
Dans le nouveau Testament, la claire vision devient le but de la sagesse. Il s’agit de voir au-delà de l’aspect extérieur ou évident. Car un bébé peut-il être Dieu tout puissant ? Un apôtre pusillanime peut-il fonder l’Église ? Un homme juché sur un âne peut-il être notre libérateur ? Un homme bafoué et assassiné peut-il ressusciter et nous donner la vie ?
Que l’Esprit Saint décille nos yeux afin que nous voyions les trésors cachés dans des vases d’argile, que nous reconnaissions le Seigneur à l’œuvre dans des signes ou des personnes qui sont apparemment anodines.
Frère Philippe Verdin
Dominicain
Couvent Saint-Thomas-d'Aquin à Lille